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SYNDICAT INTER-MASSIFS POUR LA PRODUCTION ET L’ECONOMIE DES SIMPLES

Publié le : 10 juillet 2011

« TOUT SAVOIR SUR LA DIRECTIVE THMPD , Remèdes Traditionnels à base de Plantes"

Compte rendu de la réunion publique du 21 juin 2011 au Parlement européen à Bruxelles

Michèle RIVASI, en relation les eurodéputés verts Satu HASSI, Heide RÜHLE, Carl SCHLYTER et Bart STAES a initié lundi 21 juin 2011 un forum public intitulé TOUT SAVOIR SUR LA DIRECTIVE = - « Remèdes Traditionnels à base de Plantes » (THMPD) qui visait à rassembler des PME, des TPE, des ONG et des experts en santé naturelle de plusieurs états membres - pour la France, Michèle RIVASI avait invité le Pr Robert ANTON (membre des comités d’experts Efsa, Afssaps et Afssa) et moi-même - afin de directement interroger un panel de représentants de la Commission (DG SANCO), de l’Agence Européenne des Médicaments (EMA) et de l’Autorité européenne des aliments (EFSA). elle avait également invité Me Isabelle ROBART en tant qu’expert juridique pour faire le point du droit européen en la matière.

Cette initiative résultait du constat de la très grande inquiétude et préoccupation du public – dont témoignent les quelques 1,4 million de signature pour la pétition « Collectif médecines naturelles » et les 900,000 pour celle d’Avaaz.

Une soixantaine de participants ont pris part à la réunion : Augustin De LIVOIS du collectif médecines naturelles, une représentante d’Avaaz, le Dr Robert VERKERK de l’ANH, des représentants de la médecine ayurvédique, Michel PIERRE herboriste du Palais-Royal, Philippe ANDRIANNE de la société Herbalgem, etc.
J’étais accompagné par Amanda JULLION, herboriste franco-québécoise, animatrice de l’association les Herbes sourcières (30) et sympathisante des Simples.
A mon avis, cette réunion a été très intéressante et positive. Les responsables européens n’ont pas joué la langue de bois, ils ont tenté de répondre honnêtement aux questions et ont reconnu les limites et les lacunes de cette directive.

Les points majeurs qui ont été mis en évidence à propos de la THMPD sont :
- cette directive n’est pas adaptée aux petits acteurs de la filière des plantes médicinales
- elle génère un risque de main mise de l’industrie pharmaceutique sur le secteur des plantes médicinales
- elle ne respecte pas les savoirs populaires oraux, ni la diversité des remèdes traditionnels (non prise en compte des remèdes animaux ou minéraux notamment)
- les experts qui décident de l’attribution ou du rejet des AMM n’ont pas été clairement identifiés
- rien n’est prévu dans le système d’évaluation de la procédure THMPD pour garantir le respect et la pérennité des ressources végétales médicinales ?

Cette journée ne doit pas rester sans suite ; il ne faut pas relâcher cette opportunité d’expression démocratique, il faudra interpeller à nouveau les responsables de l’UE lors des prochaines réunions qui seront probablement organisées à la suite de cette première rencontre.
A l’issue et en conclusion de cette réunion, Michèle Rivasi a estimé qu’il serait souhaitable de produire une directive pour favoriser et harmoniser le métier d’herboriste au niveau européen.

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Compte-rendu partiel -on peut écouter intégralement la réunion sur le lien suivant : http://www.greenmediabox.eu/archive...)

Après un rappel de l’objet de la directive, de sa nature et ses enjeux, à savoir préserver la sécurité sanitaire du public, faciliter et simplifier la procédure de la mise sur le marché des plantes grâce à un recul important d’utilisation qui donne une sécurité d’emploi du produit, M. Andrzej RYZ (Directeur Produits et systèmes de santé, DG Sanco) rappelle que les acteurs du marché ont bénéficié d’un délai de 7 ans pour solliciter les autorisations de mise sur le marché. La date du 1er mai 2011 est un basculement important, les médicaments à base de plantes non enregistrés à cette date sont en effet désormais interdits à la vente, mais cette date n’est pas la fin des procédures d’autorisation, on peut encore continuer de demander des autorisations.
A la demande de Michèle RIVASI, Me Isabelle ROBART, spécialiste du droit de la santé, en a rappelé l’historique en Europe ainsi que le cheminement qui a conduit à l’adoption de cette directive en 2004. elle rappelle que la tâche du législateur en Europe en matière de médicaments à base de plantes médicinales est de respecter l’équilibre entre le principe de précaution et le principe de libre circulation des produits et marchandises dans l’UE ; elle souligne que dans ce domaine c’est la définition du médicament qui est essentielle et constitue en quelque sorte le « baromètre » de la réglementation. Il est prévu qu’en cas de litige ou de doute entre le statut de médicament ou d’aliment pour une plante, c’est le statut de médicinale qui prévaudra. L’allégation et la forme peuvent faire basculer la plante médicinale vers le statut de médicament. Elle souligne que bien que cette directive simplifie un système d’enregistrement de produits à base de plantes comme médicament, il n’en demeure pas moins que d’autres problèmes restent en suspens en matière de libre circulation de la plante en Europe, puis elle conclut en faisant des propositions concrètes et en mettant en garde la commission et les agences du risque de main mise de l’industrie pharmaceutique sur le secteur des plantes médicinales que peut indirectement générer cette directive.
Trois sessions de questions-réponses ont suivi :
1 - mise en œuvre de THMPD
Dès la première session de questions-réponses, plusieurs intervenants (Augustin de Livois du Collectif médecines naturelles, Michel Pierre, responsable de l’Herboristerie du Palais-Royal à Paris, …), ont déploré la quasi disparition des herboristes en France, inéductable depuis la suppression de leur diplôme en 1941. Les responsables de la Commission ont répondu que ce problème relevait à priori de la compétence des Etats membres...

2 - risques et problèmes posés par cette directive
le problème principal que risque de poser à terme cette directive est le suivant : comment vendre des plantes en Europe en dehors du champ pharmaceutique ? Des plantes à usage multiple et banal comme le thym, la menthe ou le tilleul vont-elles devenir des médicaments ?

3 - éventuelles révisions à envisager sur ce texte.
La réponse de la Commission a été très claire, un rapport a été publié en 2008 pour faire le point sur la mise en œuvre de cette directive ; au regard de ce rapport, rien n’est prévu à ce jour pour modifier cette directive...
Un représentant d’un groupe de l’Ayurveda a réclamé la possibilité d’ajouter les produits animaux et minéraux aux substances visées par cette directive. La commission a répondu que c’est parce que les plantes représentent la majeure partie des ingrédients des médicaments traditionnels que les produits animaux ou minéraux n’ont pas été intégrés.
On voit bien par là que la culture médicale des concepteurs de la directive sont imprégnés de la seule culture pharmaceutique occidentale moderne, en effet, une multitude de produits non végétaux sont représentés dans les pharmacopées traditionnelles ou populaires, qu’elles soient exotiques ou occidentales.

J’avais personnellement adressé 3 questions écrites une quinzaine de jours à l’avance, comme cela était prévu, aux responsables de la THMPD :

Question 1 : L’usage médicinal des plantes médicinales s’est appuyé sur la construction et la transmission des savoirs oraux, bien avant que ne paraissent les premiers ouvrages scientifiques ; comment pourra-t-on avec cette directive respecter et préserver les connaissances médicales issues de cultures non écrites ?
Réponse : Après concertation, les représentants de l’UE ont reconnu que c’est un vrai problème qui n’est pas résolu avec cette directive.

Question 2 : Une tisane simple d’une plante sèche en l’état, pour laquelle il serait revendiqué une indication thérapeutique écrite notoire sur l’emballage serait-elle visée par cette procédure d’enregistrement de l’usage traditionnel et serait elle obligatoire pour chaque nouvel opérateur ? par exemple tisane de graines de fenouil ou tisane de feuilles de menthe digestives.

Réponse : Sur ce point c’est clair, dès qu’on voudra mettre sur le marché un produit à base de plante médicinale en revendiquant des propriétés thérapeutiques, il faudra suivre la procédure d’autorisation de mise sur le marché, à moins qu’il n’est bénéficié d’une A.M.M. antérieure à l’adoption de la directive en 2004.
Le coût moyen semble très variable suivant les dossiers et même les Etats (?). Des chiffre « plancher » de 1,000 à 3,000 euros par dossier ont été avancés par les représentants de l’UE, mais ils ont ajouté que a moyenne du coût dans certains pays peuvent s’élever à 10,000 et même jusqu’à 55,000 euros pour l’Italie (?).
le représentant de DG SANCO ayant lui même reconnu que cette directive s’adresse au monde industriel pharmaceutique ; on peut implicitement en conclure qu’elle est peu adaptée aux petits acteurs de la filière.

Question 3 : Dans un contexte où l’automédication devient une pratique banale et où le regain d’intérêt pour les médicaments traditionnels à base de plante et les compléments alimentaires à base de plantes est manifeste, l’Union européenne ayant produit des directives sur l’harmonisation des qualifications professionnelles, ne serait-il pas judicieux d’accompagner le dispositif d’enregistrement simplifié des médicaments à base de plante et celui de la mise sur le marché des compléments alimentaires à base de plantes, par une véritable harmonisation du métier d’herboriste au niveau européen, sachant que cette profession fut organisée en France par le passé et est toujours existante ce jour en Italie, GB et en Belgique ?

Je n’ai pas reposée cette question oralement puisque qu’elle l’a été par plusieurs intervenants, dès le début de la session, et que les responsables de l’UE se sont déclarés non compétents, nous renvoyant à la responsabilité des États-membres. Toutefois Michèle Rivasi a déclaré à la fin de la réunion qu’elle estimait qu’il serait souhaitable de produire une directive pour favoriser et harmoniser le métier d’herboriste au niveau européen.

J’ai par contre ajouté pendant la réunion deux questions supplémentaires :

Question 1- Quand on voit que pour une plante comme le neem une interdiction européennes a été prononcée quand à son usage malgré ses usages alimentaires établis par la bibliographie (études scientifiques coloniales qui ont montré que les feuilles et les fleurs ont été couramment consommées et même vendues en tant qu’aliment sur les marchés d’Hanoï) ou qu’elles sont même utilisées par les moineaux pour protéger leurs petits dans les nids des infections parasitaires, on peut présupposer de son innocuité ; alors on se demande qui sont les experts ? Quels critères font qu’une référence bibliographique est recevable ? Les ethnobotanistes font-ils partie des comités d’experts ou bien seulement des pharmacologues ? Est-il envisageable d’élargir le panel des experts à des gens de terrain, écologues, ethnobotanistes, producteurs,... ?

Réponse : Nous n’avons pas eu de réponse à cette question sans doute parce qu’il n’y avait aucun représentant de ces experts à la réunion. Tout le monde s’est accordé à dire que leur absence était très regrettable.

Question 2- Étant donné que vous reconnaissez vous même que cette directive est adaptée au monde industriel et que par conséquent vous allez favoriser le développement de ce mode de production au détriment du mode artisanal, étant donné que l’on sait quand on est comme c’est mon cas sur le terrain que le mode industriel est beaucoup plus prédateur des ressources et les met bien souvent en risque de sur-exploitation par rapport au mode artisanal, comment cette directive prend en compte la problématique de la préservation des ressources végétales médicinales, qu’est-il prévu dans le système d’évaluation de la procédure THMPD pour garantir le respect et la pérennité de la ressource végétale médicinale ?

Réponse : Après un moment de conciliabule entre les représentants de DG sanco, EMA et EFSA, il nous a été finalement répondu que rien n’était prévu.

à suivre.....et à faire circuler.

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