Vous trouverez ci-dessous et en attaché une analyse de la proposition de loi sur la lutte contre les contrefaçons et qui sera débattue au Sénat le 20 novembre. Il ne nous reste que trois semaines pour agir contre la loi sur les contrefaçons. Nous prévoyons d’organiser dès la semaine prochaine une campagne. Nous vous contactons aujourd’hui pour savoir si votre organisation souhaite se joindre à cette campagne.
Merci de nous indiquer le plus rapidement possible (d’ici la semaine prochaine) si votre organisation souhaite soutenir cette campagne.
Mail de contact :
rmitralias confederationpaysanne.fr
ou emilie semencespaysannes.fr
Si sur le principe vous vous joignez à cette campagne contre la loi contrefaçon, nous proposerons dès la semaine prochaine trois documents pour accompagner cette action :
un texte argumentaire approfondi inspiré de l’analyse ci-dessous
un texte court de communication grand public (à faire vivre dans vos réseaux !)
un lettre à l’attention des sénateurs, devant voter le projet de loi le 20-11, présentant l’amendement ci-dessous.
Pour la loi contrefaçon, nous proposons de travailler à la défense de l’amendement suivant :
« La production à la ferme par un agriculteur de ses semences, de ses plants ou des ses animaux pour les besoins de son exploitation agricole, ne constitue pas une contrefaçon, et ce quelle que soit l’origine de ces semences, de ces plants ou de ces animaux.
La production à la ferme par un agriculteur de ses ferments, levains, levures et autres préparations naturelles à base de micro-organismes ou d’autres éléments naturels issus de sa ferme ou de l’environnement naturel et destinés à ses productions fermières ou aux soins de ses cultures ou de ses animaux, ne constitue pas une contrefaçon.
La rémunération de la sélection des végétaux et des animaux destinée à l’alimentation et à l’agriculture fait l’objet de dispositifs particuliers qui ne rentrent pas dans le champ d’application des lois générales de lutte contre les contre-façons ».
Cette campagne contre la loi Contrefaçon sera suivie d’une mobilisation concernant le Brevet Unitaire Européen.
Elle fait écho à plusieurs mesures présentes dans le document « 10 mesures pour que vivent les semences paysannes » que vous pouvez trouver en PJ.
D’autres actions sont prévues pour les mois à venir dans le cadre de « semons la biodiversité » !
UNE LOI POUR POUR CONDAMNER TOUT AGRICULTEUR QUI PRODUIT À LA FERME SES SEMENCES, SES PLANTS, SES ANIMAUX REPRODUCTEURS
OU SES PRÉPARATIONS NATURELLES
à base de micro-organismes ou d’autres éléments naturels issues de sa ferme ou de l’environnement naturel et destinées à ses productions fermières ou aux soins de ses cultures et animaux
Le Sénat doit examiner le 20 novembre en procédure accélérée une proposition de loi destinée à renforcer la lutte contre les contrefaçons. Cette loi vise à mettre l’État, sa justice et sa police, au service direct des entreprises privées détentrices de Droits de Propriété Intellectuelle (DPI). Tous les dispositifs de lutte contre les contrefaçons qui concernent les marques commerciales, tous les brevets, y compris les brevets sur les plantes et les animaux, sont étendus sans restriction aux Certificats d’Obtention Végétale. Le 23 octobre, le gouvernement a examiné un autre projet de loi autorisant la ratification de l’accord relatif à une juridiction unifiée du brevet qui doit être voté par le Parlement avant la fin 2013. Cette accord crée une juridiction d’exception spécifique à la défense des DPI.
Tout agriculteur qui produit et reproduit lui-même ses semences, ses animaux, ses ferments, levains, levures et autres préparations naturelles à base de micro-organismes ou d’autres éléments naturels issus de sa ferme ou de son environnement naturel et destinés à ses productions fermières de fromages, pains, charcuterie, vins, cidres... ou à soigner ses cultures ou ses animaux est présumé contrefacteur. Sa récolte, ses animaux, ses productions fermières, ses vins et autres boissons fermentées... pourront être saisis à l’initiative des services de police ou sur simple demande du détenteur d’un brevet, d’un COV ou d’une marque commerciale qui n’aura pas besoin pour cela d’apporter au préalable la preuve de l’existence d’une contrefaçon.
Pour faciliter les saisies, ou menaces de saisies, l’État disposera de la liste de ces agriculteurs qu’il pourra communiquer aux détenteurs de DPI. Cette liste sera constituée en application de l’obligation d’enregistrement de tous les producteurs de semences de ferme découlant de loi sur les COV de 2011, de l’obligation de certification des semences animales et des animaux reproducteurs découlant de la loi d’orientation agricole de 2006, de l’obligation de déclaration sanitaire de tous les ateliers de transformation fermière, de l’obligation de déclaration de toute production de vin...
Pour piéger les agriculteurs présumés contrefacteurs, ou ayant oublié de remplir leurs obligations d’enregistrement ou de certification, les services de l’État seront autorisés à se déguiser en délinquants selon deux techniques ainsi décrites dans la proposition de loi :
"l’infiltration" : "cette procédure, qui requiert l’autorisation préalable du procureur de la République, consiste, pour un douanier doté d’une fausse identité, à s’installer dans le rôle de trafiquant pour collecter des renseignements utiles à la réalisation d’investigations fondées sur le code des douanes (visite domiciliaire, placement en retenue douanière des personnes ayant commis un flagrant délit douanier puni d’une peine d’emprisonnement) afin de notifier des infractions douanières et de procéder à la saisie des marchandises de fraude."
"les coups d’achat" : "cette procédure consiste, pour un douanier, à procéder à l’acquisition d’une certaine quantité de produits soupçonnés de constituer des contrefaçons afin de vérifier si la contrefaçon est ou non avérée."
En cas de condamnation, les dommages et intérêts devront être supérieurs aux frais engagés par les détenteur de DPI et aux bénéfices potentiels découlant de la contrefaçon.
Quelles conséquences concrètes pour les agriculteurs ?
La première conséquence sera une atteinte inadmissible à la vie sociale agricole basée sur l’entraide et la confiance. Tout le monde devra se méfier de tout le monde, notamment de toute personne demandant à échanger des semences, des animaux, des préparations naturelles... et susceptible d’être un agent de la lutte contre les contrefaçons déguisé en délinquant.
La deuxième conséquence sera un enfermement bureaucratique répressif, qui ne laissera aux agriculteurs que le choix entre :
acheter des semences commerciales, ou payer des royalties pour utilisation de semences de ferme ; que ce soit pour les utiliser ou pour ne pas les utiliser afin de rester maître de ses choix de sélection,
acheter des animaux reproducteurs certifiés pour les utiliser, ou acheter des animaux reproducteurs certifiés sans s’en servir afin de pouvoir rester maîtres de ses choix de sélection
acheter des ferments, des levains, levures, des produits de bio-contrôles et autres produits commerciaux issus des micro-organismes et des préparations naturelles peu préoccupantes utilisées dans les fermes mais protégés par des marques commerciales ou des brevets, ou risquer des poursuites en contrefaçon.
Concrètement :
s’il a reproduit ses propres semences de ferme d’une des 21 espèces dérogatoires pour lesquelles elles sont taxées, l’agriculteur devra prouver qu’il a payé les royalties dues ou qu’il a reproduit une des dernières variétés non protégées par un COV et non hybride F1 encore enregistrées au catalogue. Dans tous les autres cas, il sera condamné. s’il a reproduit à la ferme ses propres semences ou plants de légumes, soja, maïs, arbres fruitiers, vignes ou autres espèces non dérogatoires, il devra apporter la preuve qu’il a reproduit une variété non protégée par un COV et non hybride F1. Dans tous les autres cas, il sera condamné.
s’il sélectionne et conserve des variétés locales non enregistrées au catalogue, il devra prouver l’origine légale de l’échantillon de semences de base qui lui a permis de sélectionner lui même sa propre variété. Sinon, il pourra choisir entre une condamnation pour échanges de semences illégaux ou le paiement de royalties non dues
si un gène ou un caractère breveté est détecté dans sa récolte, l’agriculteur ne pourra échapper à une condamnation que dans deux cas très délimités : soit il peut apporter la preuve qu’il a acheté des semences brevetées, soit, lorsqu’il a reproduit des semences de ferme d’une des 21 espèces "dérogatoires", il peut apporter la preuve qu’il a acheté des semences brevetées dans les années précédentes et qu’il a depuis payé toutes les royalties dues à l’obtenteur. Dans tous les autres cas, et notamment s’il a produit ses propres semences ou plants de d’espèces non dérogatoires, ou bien en cas de contamination "fortuite" venant des champs voisins ou des filières d’approvisionnement, ou suite au dépôt d’un brevet sur un caractère ou un gène dits "natifs" car naturellement présent dans ses propres semences..., il sera condamné.
si un gène ou un caractère breveté est détecté dans ses animaux, il devra apporter la preuve qu’il a acheté un animal reproducteur breveté et qu’il n’a jamais vendu un des ses descendants pour une autre destination que l’abattage, et qu’il n’en a jamais échangé avec d’autres agriculteurs. Dans tous les autres cas, notamment suite à une contamination fortuite des filières de production de reproducteurs ou de semences de reproducteurs, ou suite au dépôt d’un brevet sur un caractère ou un gène dits "natifs" car naturellement présent dans ses propres animaux, il sera condamné.
si un droit de marque ou un brevet a été déposé sur une préparation naturelle ou un des constituants ou ingrédients d’une préparation naturelle qu’il produit et utilise pour ses transformations fermières ou le soin de ses cultures et de ses animaux, il sera condamné.
L’accord relatif à une juridiction unifiée du brevet instaure un nouveau tribunal international des brevets qui échappera au contrôle parlementaire, tout comme l’Office européen des Brevets qui accorde des brevets sur des gènes ou caractères naturellement présents dans les plantes et les animaux en opposition totale à la résolution du Parlement européen du 10 mai 20122. Ce tribunal poursuivra en contrefaçon tout agriculteur victime de la présence fortuite d’un gène ou d’un caractère brevetés dans ses récoltes ou ses animaux.